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Heinz Holliger

Né en 1939 à Langenthal (Suisse) dans une famille de médecins, Holliger a mené de front des études de composition, de hautbois et de piano à Berne, à Paris et à Bâle. Titulaire de plusieurs prix internationaux, virtuose unanimement célébré, commanditaire de toute une série d’œuvres pour hautbois, il mène également une carrière de chef d’orchestre qui l’a conduit à enregistrer de nombreux disques.

Présentation

Né en 1939 à Langenthal (Suisse) dans une famille de médecins, Holliger a mené de front des études de composition, de hautbois et de piano à Berne, à Paris et à Bâle. Titulaire de plusieurs prix internationaux, virtuose unanimement célébré, commanditaire de toute une série d’œuvres pour hautbois, il mène également une carrière de chef d’orchestre qui l’a conduit à enregistrer de nombreux disques.

Comme compositeur, il suivit l’enseignement de Sándor Veress à Bern, dont l’ouverture artistique et l’exigence éthique, héritées de Bartók, échappaient à l’académisme stérile qui fut la norme après la Seconde Guerre en Suisse. Ses premières compositions publiées font suite à une intense activité créatrice commencée dès l’adolescence ; elles font apparaître diverses influences : celle de Veress et de Klaus Huber (Miniatures, Schwarzgewobene Trauer, Erde und Himmel), celle de l’école de Vienne et de Berg en particulier (Liebeslieder, Elis), celle de Boulez enfin, dont il suit les cours à Bâle au début des années 1960 (Glühende Rätsel, Trio, Mobile, Siebengeang). Cette confrontation à la sensibilité boulézienne, fondée sur des choix esthétiques et des références très éloignés des siens, lui permettra de dépasser la relation spontanée qu’il avait développée avec toute une culture germanique qu’il saisit dès lors autrement.

Le lyrisme holligérien, qui a ses racines dans le romantisme et l’expressionnisme, fait éclater à la fin des années 1960 ses cadres initiaux : le dépassement des limites s’incarne dans l’utilisation de nouvelles techniques instrumentales et vocales. Dans une série d’œuvres iconoclastes, Holliger procède à une approche physique et spontanée du son, compose une musique violente, rebelle, provocatrice. Dans Pneuma pour vents (par quatre), percussion, orgue et radios (1970), ainsi que dans le Quatuor à cordes (1973), violente réaction à la contrainte du genre, il n’y a quasiment plus de sons « normaux ». Psalm (1971), sur le poème de Celan, se refuse au chant ; Atembogen pour orchestre (1974-1975) joue sur des textures bruiteuses ou indéterminées. Holliger explore l’envers des sons, faisant émerger des tensions à la fois physiques et psychiques.

Fasciné par la folie, la mort, les démarches visionnaires, Holliger croise alors sur son chemin Schumann, Hölderlin, Walser, Celan, Beckett, Soutter. Il compose alors un portrait de Hölderlin sur la base de ses derniers poèmes, Scardanelli-Zyklus pour chœur et grand ensemble (1975-1993), « se concentre sur des choses extrêmement simples », afin « de se mettre dans une position où il est impossible de mentir ». Ici, les différentes techniques d’écriture et les procédés formels apparaissent de façon transparente. Ils tendent presque tous à un épuisement du matériau par leur propre logique d’engendrement. Durant la même période, Holliger traverse l’univers beckettien, où l’on retrouve une formalisation qui absorbe et produit les significations, comme si les individus, tout en revendiquant leur subjectivité, n’étaient plus que des archétypes, des pions que l’on déplace sur un échiquier : Come and go (1976-1977), Not I (1978-1980), et What Where ? (1988) forment une trilogie, ce sont trois pièces de théâtre musical.

La quête d’une vérité cachée derrière le masque de l’apparence est l’un des thèmes fondamentaux de la musique de Holliger et de sa pratique comme interprète. On la trouve aussi bien dans la transcription (il faudrait parler de réécriture) effectuée à partir de deux pièces tardives de Liszt, Unstern et Nuages gris (Zwei Liszt-Transkriptionen, 1986), que dans le Concerto pour violon, hommage à Louis Soutter (1995). La musique s’est emparée de matériaux historiques, qu’elle réfléchit. C’est aussi vrai dans les Lieder ohne Worte I ou II pour violon et piano (1982/1994), dont le style est très dépouillé. Holliger explore ainsi le folklore valaisan dans Alb-Chehr (1991) et le monde intimiste de Robert Walser dans Beiseit (1990), où le contre-ténor, double des yodler suisses, est accompagné par la formation folklorique typique composée d’une clarinette, d’un accordéon et d’une contrebasse. Walser encore avec l’opéra Schneewittchen (Blanche-Neige, (1997-1998), ou la poétesse Marie Blasi, qui écrit dans un dialecte, pour Puneigä (2000-2002). Pour Lunea, opéra récent, le compositeur s’appuie sur un texte Lenau (2013-2017).

Prolifique en tant que compositeur, Holliger n’a jamais cessé de jouer le hautbois et de diriger, déployant une activité d’une rare intensité au service de la musique.

 

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