Edgar Varèse

Né à Paris en 1883, mais élevé dans un premier temps en Bourgogne par son grand-père, Claude Cortot (également grand-père d’Alfred Cortot), Varèse commence ses études musicales à Turin où s’est établi son père, qui le pousse vers son propre métier d’ingénieur. Varèse part toutefois à Paris pour étudier à la Schola Cantorum (avec d’Indy et Roussel) et au Conservatoire de Paris (avec Widor) ; mais cherche très vite à échapper à toute forme d’académisme et part à Berlin où il fait la connaissance de Strauss et de Busoni. Revenu en 1913 à Paris, il est encouragé par Debussy et Romain Rolland, qui s’inspirera de lui pour son roman Jean-Christophe. En 1915, il émigre aux États-Unis, dégoûté par le chauvinisme et l’esprit réactionnaire qui s’est développé en France. Il s’intègre très rapidement au milieu musical américain et développe ses idées pour une musique nouvelle et de nouveaux instruments, dirigeant et créant l’éphémère New Symphony Orchestra, puis fondant l’Association Internationale des Compositeurs qui promeut la création. Il cherche la possibilité de développer une musique électronique, mais sans succès. Il revient quelques temps à Paris à la fin des années 1920, s’intéresse aux ondes Martenot et au Thérémine, qu’il utilisera dans Ecuatorial, et imagine un projet d’opéra en collaboration avec Antonin Artaud, qui n’aboutira pas. Dépressif, Varèse ne compose quasiment rien entre le début des années 1930 et le début des années 1950. Mais sollicité par le studio de musique concrète de Paris, il peut enfin travailler avec les moyens électro-acoustiques qu’il introduit dans une œuvre d’orchestre, Déserts, dont la création en 1954 à Paris provoque un gigantesque scandale (il faut dire que l’œuvre était couplée avec la « Pathétique » de Tchaïkovski…). Il réalisera encore un Poème électronique en 1958, et meurt en 1965 à New York.

L’œuvre de Varèse est brève et fulgurante. Ayant détruit ses partitions composées jusqu’à son départ pour les États-Unis (à moins qu’elles aient effectivement brûlé, comme il le prétendit, dans un incendie à Berlin), il naît en quelque sorte à lui-même avec Offrandes et Amériques au tout début de 1920. Varèse était extrêmement critique vis-à-vis du néoclassicisme qui s’était développé en Europe, et même s’il s’était penché sur la musique de Schönberg, il n’adopta pas sa méthode de composition avec douze sons. Sa pensée musicale est fondée, d’une part, sur des objets sonores complexes, calculés en fonction de leur tension interne et jouant sur les rapports de registres, d’autre part, sur l’importance et l’indépendance du rythme, qui prolonge l’écriture de Stravinsky dans le Sacre du printemps. Dès lors, Varèse privilégie les instruments à vent et ceux à percussion, qu’il est l’un des premiers à rendre autonome dans Ionisation (1931). Sa musique aura une influence considérable sur la jeune musique, et notamment sur Jolivet et Xenakis, qui s’en réclameront. Elle offrait un premier exemple, entre Debussy et Messiaen, d’une pensée du timbre liée à une véritable pensée rythmique.